mardi 21 novembre 2017

Génomique : le rapport santé publique/vie privée

La réflexion éthique exige que l’on se pose la question des transformations que ces techniques de séquençage entraînent déjà pour les individus et pour la société. C’est d’autant plus important si l’on peut un jour outre séquencer le génome, accéder à l’ensemble des paramètres définissant le phénotype d’un individu et permettant d’anticiper son évolution et donc de l’influencer. Une des caractéristiques principales de l’information génétique est le caractère particulier de ces données, qui ne sont pas « personnelles », ou propres, au sens habituel des termes, mais qui sont à la fois personnelles, identifiantes et communes à une parentèle. Dès lors comment gérer par le biais de procédures propres à une personne ce qui relève de plusieurs ? Il est nécessaire de distinguer le cas où la « mise en fiche » est de nature purement privée et susceptible de conduire à des usages commerciaux de celui où elle répond à un but a priori légitime de santé publique au profit de la collectivité publique. Les violations de la vie privée par le biais des fichiers de caractéristiques génétiques ne sont évidemment pas seulement dangereuses en elles-mêmes, mais par les utilisations qui pourraient en être faites. Un marché des données est déjà partiellement une réalité. On ne saurait en outre, ignorer le risque de leur exploitation dans certaines régions du monde, par des régimes politiques liberticides. Si seul le point de vue de l’amélioration de la santé publique à partir des données génétiques individuelles collectées prévaut, la protection de la vie privée peut être considérablement atteinte, d’autant plus que l’épigénétique, donc l’histoire des personnes et leurs comportements, est nécessaire à une juste interprétation des données génétiques. Dès lors, sous couvert de faire progresser la santé publique, de sérieuses intrusions pourraient être portées sur la vie privée pour mieux caractériser les comportements. On comprend alors qu’un contrat de réciprocité entre vie privée de l’individu et santé publique doit être à chaque fois établi, avec l’objectif de définir distinctement les atteintes et les bénéfices portés au droit capacitaire des personnes.