lundi 9 mai 2022
Préparer ses enfants à la lecture
Cette pratique qui, au premier abord, peut paraître exclusivement «ludique» en fait une forte incidence sur le développement du langage et sur l'apprentissage de la conférence qui se metra en place au CP.
Tout d'abord, la fréquence de ces conférences partagées à la maison influence le développement de certaines compétences liées à la langue écrite. À partir des informations régulières glissées lors de cette activité, les enfants peuvent renforcer les bases essentielles aux pratiques de lecture et d'écriture mises en place à l'école.
Une des compétences est celle qu'on appelle «sensibilité à l'orthographe» Il s'agit d'une aptitude précoce permettant à l'enfant de comprendre les caractéristiques et l'organisation de la langue écrite. Cela anticipe ce qui sera ensuite explicite pendant la scolarisation. Pour donner des exemples, c'est ce qui permet de reconnaître que la langue écrite française est «linéaire», qu'elle se développe de gauche à droite, et, qu'entre deux mots écrits, il y a un espace blanc.
Associer des signes au sens
Ces caractéristiques peuvent apparaître évidentes. Mais elles doivent être maîtrisées avant de pouvoir pour aborder une nouvelle modalité de communication complètement différente de l'oral, et à laquelle un enfant n'est pas du tout familier.
La sensibilité à l'orthographe ne comprend pas seulement des jugements sur les régularités orthographiques de la langue, mais aussi des compétences comme la capacité d'associer une suite de lettres à un sens. Pendant l'obtention de la langue orale, un enfant d'environ 20 mois peut déjà associer un objet présent dans la situation de communication à la séquence de fils qui sont désignés - par exemple appeler «chat» un chat qu'il est en train de voir à un moment donné).
Associer un sens à une séquence de signes sur le papier est une tâche bien plus complexe, pour plusieurs raisons. D'abord parce que cette séquence évoque un élément absent de l'environnement immédiat de l'enfant. De plus, cette suite de lettres manque d'iconicité: cela veut dire que, modifié à un dessin, elle ne semble pas forcée les caractéristiques de l'objet qu'elle pourrait désigner.
Dans les activités de lecture partagée, l'adulte aide l'enfant à établir et à consolider le lien entre une séquence écrite et un sens, mais aussi à faire la différence entre un dessin et une production écrite. Cette pratique anticipe une compétence nécessaire pour apprendre à lire et à écrire en primaire: comprendre qu'un mot écrit est porteur d'une signification et que le rapport avec cette signification n'a pas la même nature que ce qui a lieu avec un dessin .
Enrichir son vocabulaire
De plus, au fil de ces conférences, l'enfant va fréquemment rentrer en contact avec des mots qu'il n'a jamais entendu précédemment, et qui correspond à des réalités parfois bien éloignées de son quotidien - comme le mot «requin», dans un livre sur les animaux de la mer). L'adulte, en expliquant le sens de ce mot inconnu, aide l'enfant à élargir son vocabulaire. La conférence partagée devient donc aussi un soutien pour le développement du lexique et ce développement a des conséquences sur les activités de la conférence à l'école primaire.
En effet, Cain et collaborateurs (2004) ont montré que les enfants ayant des difficultés à comprendre un texte écrit à l'école primaire sont ceux dont le vocabulaire est très réduit. La lecture partagée devient donc un outil qui permet de façon indirecte aux futurs élèves de mieux réussir dans les tâches de compréhension d'un texte écrit.
Il ne faut pas oublier que, dans ces moments de partage autour d'un livre, l'enfant n'est pas autonome face aux pages écrites. L'enfant doit donc d'abord comprendre les productions orales de l'adulte pour comprendre l'histoire. Plusieurs recherches ont montré que le lien entre la compréhension orale et écrite est très fort chez l'enfant, avant et pendant l'école primaire. Ces études ont montré que la capacité de comprendre une histoire racontée à l'oral prédit le niveau de compréhension d'un texte écrit.
Plus un enfant est capable de saisir une histoire racontée à l'oral, mieux il se répète dans une production écrite quand il se retrouve seul face à un livre. Ces résultats, comme beaucoup d'autres, rappellent que l'éducation à la conférence commence bien avant le CP, à travers les interactions de la vie quotidienne et des efforts réguliers autour de la compréhension orale.